lundi, 13 novembre 2006
Cet air qu’on cherche, 2/4
À l’âge de dix-sept ans, en 1917, Gerardo Matos Rodriguez écrit la musique de La Cumparsita. Il la vend vingt pesos à l’éditeur Breyer. En 1924 – Léo Ferré a alors huit ans – , Rodriguez se rend à Paris et rencontre Francisco Canaro, qui vient d’arriver en France avec son orchestre. Enrique Maroni et Pascual Contursi écrivent des paroles sur la musique sans avoir l’autorisation de l’auteur. À partir de 1925, le tango La Cumparsita va faire le tour du monde. Il est hautement probable que Léo Ferré ait lui-même dansé un jour sur cette musique. En tout cas, il l’a entendue, puisque personne n’y a échappé.
Dans son disque de 1962,[1] il interprètera, pour saluer l’accordéoniste Jean Cardon, la chanson qu’il lui dédie, Mister Giorgina. Le mot giorgina signifie « accordéon » en argot italien. À travers cet hommage à son ami, il évoque évidemment le célébrissime tango dont il fait quasiment une figure emblématique, obligée. Il forge même un verbe savoureux : « se faire cumparsiter », expression justifiée puisque, c’est bien connu, « On va au bal pour tu sais quoi ».[2] On reparlera plus loin du bal.
Quatre ans auparavant, son ami Caussimon lui avait confié sa chanson Le Temps du tango dont Ferré fit un beau succès. Ces couplets lui rappelaient certainement sa jeunesse. Il est peu douteux en effet que, comme l’auteur des paroles, il ne se soit dit un jour, saisi par le vertige du temps et son intolérable poigne : « Faudrait pouvoir fair’ marche arrière / Comme on l’ fait pour danser l’ tango ».[3] En 1958, Ferré a quarante-deux ans, l’âge où déjà remontent les marées amères sur les plages de la maturité.
(À suivre)
[1]. Léo Ferré, 33-tours 30-cm Barclay, 80185 M.
[2]. Le Guinche.
[3]. Le Temps du tango.
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