vendredi, 15 juin 2007
Le site de l’INA
On a pu observer, récemment, l’ajout de nouvelles images de Léo Ferré sur le site de l’Institut national de l’audiovisuel (INA). Quelques conclusions s’imposent.
Le fonds initial, ainsi que les compléments qui lui avaient été apportés précédemment, proposaient deux sortes de documents. Ceux qu’on pouvait acheter (quelques brefs instants étaient proposés en visionnage afin de savoir de quoi il s’agissait) et ceux que l’on pouvait soit acheter, soit visionner gratuitement dans leur intégralité. Intégralité d’ailleurs relative puisqu’il s’agissait, le plus souvent, d’extraits saucissonnés d’une même émission. Pas toujours cependant : certaines émissions étaient intégrales. Plus exactement, il s’agissait de l’intégralité d’un sujet (par exemple, « La vie de château ») dans le cadre d’une émission plus longue (Panorama) ; mais au moins, on disposait d’un tout. Soit gratuitement sur un tout petit écran, soit en payant et en passant alors au plein écran. Je n’évoque pas ici les ennuis techniques qu’a longtemps connus le téléchargement. Cela, aujourd’hui, est rétabli.
L’ajout récent ne comporte, lui, que des extraits payants (avec, comme toujours, l’offre d’un bref visionnage d’information) et l’on s’aperçoit qu’il s’agit exclusivement de chansons interprétées dans telle ou telle émission de télévision, ces chansons étant totalement coupées de leur contexte et, par conséquent, incompréhensibles – j’entends par là : inutilisables « historiquement » et quant à la signification de leur présence dans l’émission. Pis : si les références de l’émission sont heureusement données, ce qui est bien le moins, on s’aperçoit que la courte fiche descriptive systématiquement fournie avec le document, fiche qui, à l’ouverture du site, était aussi détaillée que possible compte tenu du bref espace dont elle disposait, est aujourd’hui réduite à rien : « Léo Ferré interprète telle chanson ». On achète donc une chanson filmée, point final. Qu’y avait-il avant ? Après ? Quel était le genre de cette émission ? La chanson a-t-elle été présentée par Ferré et si oui, comment ? Y a-t-il eu un entretien avec l’artiste ? On a délibérément abandonné la contextualisation artistique et historique au profit de l’événement ponctuel, factuel, qui saura peut-être satisfaire les fanatiques mais ne correspond à rien intellectuellement parlant.
En résumé, deux choix ont été faits : abandon de la contextualisation et des descriptions ; paiement systématique. Autrement dit, choix du commerce contre la documentation et la recherche. Ce n’est certainement pas étonnant. Je précise que le principe du paiement ne me dérange pas a priori, mais je ne veux pas être simplement un cochon de payant, comme on dit. Il nous appartient d’utiliser à l’avenir le site de l’INA en tenant compte de cela et en n’achetant pas n’importe quoi. Par ailleurs, on aura également vu que le critère de classement des documents est, par défaut, celui de la pertinence (on peut le modifier et le remplacer par celui de la date de l’émission ou celui de sa durée). Rien n’a été fait pour signaler visuellement les ajouts. Dans tous les cas, il faut partir à la recherche des nouveautés, c’est-à-dire avoir en tête la totalité du catalogue précédent, ce qui, déjà, devient hypothétique, alors qu’on ne propose à ce jour que cent-dix documents. On a privilégié le ludique, le spectacle, et oublié l’intérêt archivistique, pourtant évidemment primordial.
Je ne parle ici que de Léo Ferré mais, bien entendu, les derniers ajouts concernant d’autres artistes ont subi le même sort.
00:00 Publié dans Propos | Lien permanent | Commentaires (7)
Commentaires
Et encore il faudrait préciser que vous n’achetez que le droit de visionner la vidéo, et non la vidéo elle-même, puisque vous êtes obligé de la lire dans un logiciel spécifique et être connecté à Internet… Qui plus est, on ouvre à peine le fichier que Ferré est déjà en train de chanter (on loupe la plupart du temps quelques notes), donc impossible d’extraire un fichier audio correct pour sa collection…
Écrit par : koh | vendredi, 15 juin 2007
Effectivement, on achète un droit de visionner. Plus précisément, on achète le droit de télécharger le document pour un nombre infini de lectures ultérieures. Il faut certes un logiciel spécifique mais, soyons justes, il est fourni sur le site de l'INA et gratuitement.
Le saucissonnage a effectivement créé ce problème des premières notes parfois manquantes. C'est révélateur, d'ailleurs : on ne peut sans dommage extraire quelque chose d'un tout. Il devait y avoir, à l'origine, des enchaînements, peut-être des "fondus".
Ce n'était pas toujours le cas des premiers documents, en tout cas pas forcément. On a vraiment choisi la vente, le commerce, au détriment de la notion d'archives.
Écrit par : Jacques Layani | vendredi, 15 juin 2007
Justement, un cent-onzième document vient d'être ajouté, sans crier gare : le journal de 20 h du 8 mars 1959 (un couplet de Comme dans la haute, une interview et L'Etrangère), c'est un visionnage gratuit de cinq minutes et treize secondes.
Écrit par : Jacques Layani | mardi, 19 juin 2007
Justement, un cent-onzième document vient d'être ajouté, sans crier gare : le journal de 20 h du 8 mars 1959 (un couplet de Comme dans la haute, une interview et L'Etrangère), c'est un visionnage gratuit de cinq minutes et treize secondes.
Écrit par : Jacques Layani | mardi, 19 juin 2007
J'ai l'impression que les derniers arrivages ont été retirés...
Écrit par : KOH | jeudi, 21 juin 2007
Ah, effectivement. C'est incompréhensible. Je ne saisis pas la logique, s'il en est une, de ce catalogue.
Écrit par : Jacques Layani | vendredi, 22 juin 2007
Je signale l'ajout tout récent (peut-être aujourd'hui même) de dix chansons extraites d'une émission entièrement saucissonnée, intitulée Vedette et son public, du 9 septembre 1969. Les interviews et les questions du public sont coupées, il n'y a "que" les chansons, dans n'importe quel ordre.
Emission en couleurs (très rare en 1969), en bon état de conservation technique. Léo Ferré est bien filmé. Beaucoup de gros plans : on a les yeux, le sourire. Les mains aussi sont bien filmées. Je dis cela parce que, souvent, les émissions de télévision étaient alors filmiquement nulles. Ce n'est pas le cas ici.
Une nouvelle fois, la démarche commerciale est évidente. Une émission entière, à l'INA, coûte entre quatre et six euros, je crois. En vendant (sans possibilité de visionnage gratuit, hormis un court extrait) un euro cinquante chaque chanson, l'INA gagne quinze euros lorsqu'on les achète toutes.
Ce n'est pas la question : l'essentiel demeure, c'est-à-dire la disparition de tout contexte, de toute architecture, de toute structure, donc de toute réflexion possible. Qu'était cette émission ? Que représentait-elle ? Où voulait-on en venir ? Mystère.
Écrit par : Jacques Layani | lundi, 09 juillet 2007
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