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lundi, 12 novembre 2007

Léo Ferré acteur et musicien du cinéma : nouveaux éléments

Dans le livre Les Chemins de Léo Ferré, j’avais évoqué les quatre films courts auxquels il a participé par le commentaire, la musique. Voici quelques précisions complémentaires, tant il est vrai qu’un livre n’est jamais achevé, une quête toujours infinie, une vague renouvelée sans cesse à l’horizon documentaire.

Tout d’abord, un retour sur Paris-Taxis, et non Paris-Taxi comme je l’avais indiqué fautivement, le pluriel faisant bien partie du titre. Voici ce que j’écrivais dans mon livre.

Plus anciennement, Ferré écrivit quelques musiques de films courts, et c’est ce domaine qu’il faut explorer le mieux possible, car il est le moins connu. En tout état de cause, c’est sur lui que les tentatives de reconstitution documentaire, le plus souvent, achoppent. En ces années, une séance de cinéma ne se concevait pas sans première partie, laquelle comprenait des actualités, un dessin animé, l’annonce des prochains spectacles et un documentaire ou un court-métrage, dit aussi « petit film ». Quand ne s’ajoutaient pas à tout cela quelques attractions, durant l’entracte !

Le premier de ces films est Paris-Taxi, court-métrage d’Édouard Logereau, en 1949, dont la chanson, interprétée par Zizi Jeanmaire, fut enregistrée, longtemps plus tard, dans Zizi Paris, un 25-cm Philips assez rare [1] ; curieusement, aucun autre interprète ne l’a inscrite à son répertoire ; le titre du film était très exact, puisqu’on y montrait quelques aspects de la vie à Paris, d’après des scènes vécues par des chauffeurs de taxi ; la chanson, traitée en une très jolie valse, est bien dans la manière de Léo Ferré, puisqu’elle se rattache finalement à l’esprit des Amants de Paris, des Forains et de L’Île Saint-Louis. On peut en juger par ces quelques extraits : « Les beaux taxis / Font la cour à Paris / À la nuit / Mais les amants / Font l’amour à Suresnes / Je t’aimais tant / Sur les bords de la Seine / Qu’il n’est plus temps / De finir ma rengaine (...) / Mais à Paris / On s’aime davantage (...) / L’amour ça n’a pas de prix / Ça se fait sans bagages / Combien d’amoureux / Ont usé leur tendresse / Oublié leur adresse / Dans les taxis (...) / Qu’importe où vont les taxis / Puisqu’ils vont où l’on s’aime... »

On peut ajouter à présent que le commentaire est de Pierre Dac et que Léo Ferré a signé la chanson, mais aussi la musique qu’on peut entendre tout au long du film, musique hélas couverte par la voix du commentateur, toujours haut perchée ainsi qu’il était d’usage dans ces courts-métrages un peu parodiques, au rythme accéléré, dont on produira de nombreux exemplaires jusqu’à l’arrivée de la Nouvelle vague, ou à peu près. Cette partition, a priori, s’apparente à Musique byzantine. La chanson est interprétée par Jacqueline François – il y eut donc deux interprètes et non une seule comme je le croyais – qui ne chante que deux couplets : le premier disparaît. Zizi Jeanmaire, elle, ne chantait pas le dernier. Cette valse, finalement, ne fut donnée intégralement que par Ferré lui-même, lors de son récital au Vieux-Colombier, en janvier 1961.

Voici ce que j’écrivais encore.

Le second, Au temps du cinématographe, autre court-métrage, de Pierre Céris cette fois, date de 1950. À ce jour, malheureusement, il n’a pas été possible d’apprendre quoi que ce soit concernant cette réalisation, mais les recherches se poursuivent.

Il s’agit finalement d’une évocation du cinématographe débutant, faite avec les caractéristiques ci-dessus énoncées : choix du burlesque, commentaire dit d’une voix haut perchée, musique un peu « écrasée » par le texte. On note que celui-ci fut établi par Paul Guimard et dit par André Var. Le générique mentionne : « Accompagnement musical de Léo Ferré ». Cet accompagnement est fait au piano et l’on y entend notamment quelques mesures de Paris-Canaille (alors que la chanson n’était pas encore écrite) et de Martha la mule. La seconde partie est soutenue par une partition orchestrale, mais elle ne paraît guère relever de Ferré, tout au moins dans les conditions d’écoute possibles.

 

Remerciements : Daniel Dalla Guarda et Donatella Nebbiai.

___________________________

[1]. Zizi Paris, 33-tours, 25-cm, Philips, B 76523 R.

00:00 Publié dans Études | Lien permanent | Commentaires (16)

Commentaires

Hier, j'ai vu Morceaux de conversation avec Jean-Luc Godard, par Alain Fleischer.

Le film s'ouvre sur l'intro instrumentale de L'oppression. On l'entend une seconde fois un peu plus loin.
Pour info, c'est un morceau que semble particulièrement chérir Godard puisque c'est celui parmi ceux de Ferré qui revient le plus dans ses travaux.
Je suppose que nous sommes à la fois dans le clin d'oeil et dans l'imprégnation de l'intimité de l'artiste.

Bon, cela n'a pas grand-chose à voir avec le court-métrage, mais je ne voyais pas d'autre endroit pour transmettre l'info.

Pour qui s'intéresse à Godard, le film est par ailleurs passionnant.

Écrit par : The Owl | vendredi, 27 février 2009

Noté, merci.

La liste des chansons (ou musiques) reprises dans des films, telle que je l'avais établie dans Les Chemins de LF, était évidemment non exhaustive, je l'avais dit. Elle doit être sans fin et susceptible d'être augmentée régulièrement. Le but du texte était de parler de LF, acteur et musicien du cinéma : il fallait évidemment comprendre "musiques écrites par lui pour l'écran" ; le reste, les chansons reprises dans les bandes-son, c'était juste pour mémoire.

Écrit par : Jacques Layani | vendredi, 27 février 2009

The Owl,

J'ai l'impression que le corpus Ferré de Godard se restreint à: L'oppression, Richard, La Solitude, Le Conditionnel de Variété, Ton Style, Tu ne dis jamais rien... à ces deux disques. Les citations peuvent être textuelles. Je ne sais pas si tu as lu le livre de Maurice Frot, où celui-ci raconte une rencontre (un peu foireuse) entre les deux.

Suggestion: les cinéphiles des Cahiers, de Libé de la grande époque se rendaient à Hollywood pour interviewer leurs maîtres... Tu te décides quand pour la Suisse?

Suggestion aux éditions LMELM: qu'avec ce dont ils disposent, ils fassent faire par Godard une compilation Ferré commentée... Là, cela ferait un disque événement.

Écrit par : gluglups | vendredi, 27 février 2009

Est-ce que ces deux disques sont contemporains de ce qu'on appelle les "années Mao" de Godard ? Je pense que oui, mais je ne connais pas assez le sujet.

Au demeurant, s'il ne le cite plus par la suite, Godard continue à suivre Léo Ferré. La photo d'une rencontre en 1988 (de mémoire) l'atteste.

Écrit par : Jacques Layani | vendredi, 27 février 2009

Les années mao de Godard, c'est en gros 72-74.

" Le conditionnel de variétés" est ,disait-on à l'époque , une
"commande" de Godard.Disons une suggestion très appuyée.

Je pense qu'il a continué à l'écouter..Gogard a une certaine
fidélité,une continuité dans ses gouts. Il me semble bien qu'il y
ait dans "histoire de cinéma' des passages avec de la musique
de Ferré..Je n'ai pas revisionné mes cassettes depuis longtemps...

Écrit par : Francis Delval | vendredi, 27 février 2009

""histoire de cinéma' des passages avec de la musique de Ferré": ou plutôt des extraits de textes ("je ne suis qu'un artiste de variété", voir ce qu'on ne voit pas, etc.) dans ce long discours citationnel. Godard fait dire à Johnny Hallyday un passage de Richard dans un film dont le nom m'échappe, mais postérieur aux années Mao.

Écrit par : gluglups | vendredi, 27 février 2009

" Le conditionnel de variétés" est ,disait-on à l'époque , une
"commande" de Godard.Disons une suggestion très appuyée.

Pourriez-vous en dire plus?

Écrit par : gluglups | vendredi, 27 février 2009

Le journal "La cause du peuple" ayant été interdit en mai 70
par Marcellin, ministre de l'intérieur de Pompidou,il continuera
à paraître en fusionnant avec " J'accuse", autre journal mao.., et
dont Sartre assurera la gérance à partir de 71....A mettre au conditionnel: ce serait Godard, qui soutenait et vendait le journal
dans la rue, avec Sartre, Foucault ou Claude Mauriac, qui aurait
demandé à Ferré d'écrire une chanson pour soutenir "La cause
du peuple".
Le titre aurait été trouvé par J.P.Chabrol.J.L.Calvet, qui n'écrivait pas encore de mauvais livres , dont un sur Ferré,obtint de Ferré le droit de vendre la " C du P" dans la salle à la fin des concerts.

Le soutien affiché de Ferré au journal (et au parti clandestin
dont il était l'écho,) valut à Ferré des agressions multiples des
militants de la Ligue communiste , et aussi de groupuscules
anarchistes . cf le fameux concert de Lille , et les jets de tire-fonds sur la scène. ( J'y étais...).
Ferré rencontrera Sartre et Beauvoir peu après, en 73 , pour la fondation de Libé auquel Ferré donnera son soutien
(financier ?).
La période mao de Godard, c'est donc 71-74, avec surtout
le film "tout va bien"...Le film de 66 ou 67 "la chinoise" était
déjà un film sur les maos français de l'époque...

En avril 88, il y eut une rencontre Ferré-Godard.Godard
proposa à Ferré de jouer le rôle de Beethoven, mais le film
ne se fit pas ...J'en ignore la raison.
Notons au passage le pataquès de Belleret,disant que la
chanson " le conditionnel de variétés" est une chanson situationniste, en référence au concept de "situation " chez
Sartre ! (sic)....Comment pouvait-on ignorer le mouvement
situationniste de Debord et Vaneigem ( scission entre les 2 courants en 67 environ), quand on est reporter au "Monde"?

Écrit par : Francis Delval | vendredi, 27 février 2009

"J'ai l'impression que le corpus Ferré de Godard se restreint à: L'oppression, Richard, La Solitude, Le Conditionnel de Variété, Ton Style, Tu ne dis jamais rien... à ces deux disques."

Eh bien le Glups, on peut dire que tu connais ton JLG sur le bout des doigts ! Quel éclectisme !
Godard utilise aussi Frères humains/L'amour n'a pas d'âge dans Passion (1982).


"Suggestion: les cinéphiles des Cahiers, de Libé de la grande époque se rendaient à Hollywood pour interviewer leurs maîtres... Tu te décides quand pour la Suisse?"

Godard ne répond plus guère aux sollicitations.
(je ne suis pas un cinéphile stricto sensu)


"Suggestion aux éditions LMELM: qu'avec ce dont ils disposent, ils fassent faire par Godard une compilation Ferré commentée... Là, cela ferait un disque événement."

Après le wiki-mirage, encore une belle idée couillosive. Le Glups voit loin et en technicolor.
Godard, c'est quand même autre chose que Jean-Louis Murat.
Ptêt bien que cela aurait un effet Ferré-Barthes ?


""histoire de cinéma' des passages avec de la musique de Ferré": ou plutôt des extraits de textes ("je ne suis qu'un artiste de variété", voir ce qu'on ne voit pas, etc.) dans ce long discours citationnel.

Dans Room 666 de Wim Wenders, il conclut son monologue par "L'incroyable c'est ça, c'est ce qu'on ne voit pas. Et le cinéma c'est montrer l'Incroyable."
Visible ici : http://www.youtube.com/watch?v=3hdAcxvQrUs

Par contre, je n'ai pas souvenir de citations "dans le texte" dans les Histoire(s)... En même temps c'est tellement profus !
Je crois me rappeler par contre que deux extraits musicaux de Ferré sont utilisées comme citations textuelles (genre un vers ou deux du Conditionnel de variétés et... ?).


"Godard fait dire à Johnny Hallyday un passage de Richard dans un film dont le nom m'échappe, mais postérieur aux années Mao."

Il s'agit de Détective (1985).

Écrit par : The Owl | vendredi, 27 février 2009

FD: "A mettre au conditionnel: ce serait Godard, qui soutenait et vendait le journal dans la rue, avec Sartre, Foucault ou Claude Mauriac, qui aurait
demandé à Ferré d'écrire une chanson pour soutenir "La cause
du peuple".": la source, c'est Maurice Frot?

The Owl:
"Eh bien le Glups, on peut dire que tu connais ton JLG sur le bout des doigts ! Quel éclectisme !" Ben pas vraiment, car je n'avais pas vu Passion (et beaucoup d'autres).
Par contre la source de l'interview de Wenders, je crois que c'est moi, lol, car je l'avais signalée sur l'ex forum me semble-t-il, du temps où tu n'étais pas encore né.
"L'incroyable c'est ça, c'est ce qu'on ne voit pas", c'est vraiment la phrase qui explique tout pour Godard. Pas seulement le Cinéma mais aussi le conflit israëlo-palestinien, lol (je suis sérieux).

J'ai l'impression que Jacques et Francis sont très modérément intéressés par Godard, je me trompe?

Écrit par : gluglups | samedi, 28 février 2009

oui, vous vous trompez tout à fait..J'aime beaucoup Godard, ainsi que Rohmer, et Straub, quant au ciné français..Dans le n°
des CDLN sur Baudelaire, il y a un long paragraphe sur Godard,
mais vous ne lisez pas forcémént ce genre de revues.

Quant à la source, ce n'est pas Frot, mais ma mémoire, et j'ai
suivi de près, sans y être , l'histoire de la "Cause du peuple"..

Le conditionnel s'impose, car il n'y a jamais eu de confirmation
officielle...pourquoi faire?..Les idées circulaient..

Écrit par : Francis Delval | samedi, 28 février 2009

Je ne suis pas un "fan" de Ferré qui compte les bouts de chansons et de musique , qu'on peut retrouver ici ou là dans
tel ou tel film..
Godard est un des cinéastes qui ont marqué ma génération, quand on séchait le lycée (la gym de préférence) ou la fac, pour
aller voir son dernier film, ou le nouveau Truffaut ou Visconti.
J'ai encore à la maison une vingtaine de cassettes de Godard, et de nombreux DVD, un double CD avec la bande-son intégrale
de "Nouvelle vague", et plusieurs livres de et sur Godard..Et
l'enregistrement maison de "Histoire(s) de Cinéma"....Il y eut
d'ailleurs un n° spécial d'Art Press en 98 sur ces émissions.Il
est très bien fait


Je remarque(tout à fait amicalement..)qu'en ce qui me concerne (et aussi ce qui concerne Jacques) vous vous trompez souvent....Changez un peu votre angle de vision...nous ne "regardons" pas Ferré tout à fait de la même
manière, car nous ne l'avons pas abordé de la même façon
ni à la même époque....question de génération...sans plus.
n

Écrit par : Francis Delval | samedi, 28 février 2009

Je ne déteste pas Godard. Je suis peu connaisseur du cinéma, j'aime quelques réalisateurs mais ne suis pas cinéphile. J'aimerais revoir Alphaville, plus vu depuis... 1965, par là. Et puis, c'est grâce à Godard qu'on connaît le visage et la voix de Gaby, alors... (Rires).

Écrit par : Jacques Layani | samedi, 28 février 2009

Deux courts- métrages de Godard sont sortis en 2004,"Prières
pour refuzniks" (1 et 2) , dont les images sont reprises au film "les carabiniers"..
La prière 1 s'achève sur l'exécution d'un militant marxiste-
léniniste (Maoïste?).Sur cette séquence, on entend en off la
chanson de Ferré " L'oppression"...On peut dire que Ferré a
vraiment accompagné Godard depuis plus de 40 ans...et gardé
les mêmes valeurs politiques....

Nous n'avons certes pas besoin de Frot pour avoir des "infos" sur Ferré....

Écrit par : Francis Delval | samedi, 28 février 2009

lire:et que Godard a gardé le mêmes valeurs politiques.

Écrit par : Francis Delval | samedi, 28 février 2009

C'est peut-être d'ailleurs une de ses limites, non ?
(en ce sens que ces valeurs ont induit chez lui une grille de lecture qui ne s'est pas actualisée)

Écrit par : The Owl | samedi, 28 février 2009

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