jeudi, 06 décembre 2007
Ferré dans les dictionnaires et les encylopédies
Après l’inventaire du Who’s who in France, il peut n’être pas inutile d’en établir un autre.
« Auteur de chansons dont il écrit le plus souvent texte et musique (…), il a composé une Symphonie interrompue et un oratorio pour quatre soli, chœurs et orchestre sur La Chanson du mal-aimé d’Apollinaire ainsi que deux concertos et un opéra », écrit entre autres le Dictionnaire illustré des musiciens français (Seghers, 1961), à propos de Léo Ferré.
« Chanteur et compositeur monégasque (…). Il écrit les textes et la musique de ses chansons. Est également l’auteur d’un oratorio et d’une Symphonie interrompue », relève Frank Onnen dans Encyclopédie de la musique (collections « Références », n° 6, Séquoia, 1964), ouvrage d’un éditeur belge que l’inspection générale de l’éducation musicale offrait comme prix aux élèves de la ville de Paris.
« Révolté, tendu, vengeur, L. Ferré a traité la chanson avec rigueur (…). Il est aussi l’auteur d’un opéra (La Vie d’artiste, 1950), d’un oratorio sur le poème d’Apollinaire La Chanson du mal-aimé (créé en 1954) » conclut le Dictionnaire de la chanson française de France Vernillat et Jacques Charpentreau (collection « Les dictionnaires de l’homme du XXe siècle, n° D 27, Larousse, 1968).
En 1969, le Grand Larousse encyclopédique en 12 volumes consacre à Ferré une notice dans son supplément, tome 1. Il y est question de « chansons amères et grinçantes, cruelles et anarchistes, qui ne manquent ni d’humour ni de poésie » et le recueil Poète… vos papiers ! est mentionné.
L’Encyclopedia Universalis, dans son volume 18, publie, en 1974, une notice dans laquelle on peut lire : « Son œuvre est sans cesse tiraillée entre la poésie pure (L’Étang chimérique, par exemple) et la mise en musique des poètes (…) d’une part, la chanson politique d’autre part (…). Il va, en 1968, alors qu’il se trouve au sommet de sa gloire, effectuer un étonnant virage et contribuer sans doute à la rénovation de la chanson française. (…) Ses œuvres, qui ne doivent alors plus rien à la conception classique de la chanson, deviennent une sorte de poésie orale, parlée, qui frappe par sa sincérité d’inspiration, sa beauté formelle et sa violence ».
Frank Lipsik écrit, lui : « Il se remet en cause totalement sans la moindre humilité et c’est en 1969 Le Chien, qui claque comme un coup de fouet et qui marque définitivement la nouvelle carrière de Léo Ferré, plus engagé, plus difficile, plus solitaire, mais encore plus grand, plus riche et plus exigeant » (Le Dictionnaire des variétés, Mengès, 1977).
Sobrement, le Petit Larousse en couleurs de 1980 note : « Chanteur français, né à Monte-Carlo en 1916, auteur de chansons amères, grinçantes, parfois anarchistes et pamphlétaires ».
Le Dictionnaire universel des noms propres de Robert, dans son tome 2, indique, toujours en 1980 : « Ses chansons prennent la forme de pamphlets, de professions de foi ou de poèmes, sur des orchestrations utilisant souvent des genres populaires (musiques de danse) ».
Le Grand Larousse universel de 1983, dans son volume 6, parle de nouveau de ces « chansons amères et grinçantes, cruelles et anarchistes, qui ne manquent ni d’humour ni de poésie » en précisant que Ferré « reste un auteur quelque peu marginal, qui contribuera néanmoins, plus que d’autres, au renom de la chanson française ».
L’Encyclopedia Universalis, dans le Thesaurus-Index 1, A-Friedländer, en 1985, avance : « Établi en Italie depuis 1972 [sic], il se produit moins souvent aujourd’hui. Il a cependant publié deux ouvrages (Le [sic] Testament phonographe, 1980 et Dis donc, Ferré…, 1980 [sic]) et a enregistré plusieurs beaux albums comme Et… basta !, La Violence et l’ennui, Ludwig, L’Imaginaire, Le Bateau ivre, etc. »
« Sa façon de chanter, pour particulière qu’elle soit, émeut souvent. Les yeux fermés, les jambes écartées, Ferré se pose en grand prêtre, illuminé et revendicateur », écrit Pascal Sevran dans Le Dictionnaire de la chanson française (Lafon-Carrère, 1986).
Le Grand Larousse en 5 volumes, publié en 1987, reprend, dans son volume 2, les notices précédemment publiées par la maison, en supprimant la mention « qui ne manquent ni d’humour ni de poésie ».
« Un grand monsieur que cet anarchiste de cœur », conclut Alain-Pierre Noyer dans son Dictionnaire des chanteurs francophones de 1900 à nos jours (Conseil international de la langue française, 1989), après une notice exclusivement biographique.
Christian Dureau relève « une incursion dans la pop-music (il travaille avec le groupe Zoo) » dont il estime qu’elle « précède un retour à un style plus pur, plus proche de sa vraie nature, répondant mieux à ce qu’attendent ses inconditionnels. Aujourd’hui encore, il demeure le vieil anarchiste que l’on sait, le lion à la crinière blanche toujours prêt à choquer et à dire ce qu’il a sur le cœur. Il vit en Toscane avec sa seconde [sic] épouse » (Dictionnaire mondial des chanteurs, Vernal-Philippe Lebaud, 1989).
L’Universalia 1994, la politique, les connaissances, la culture en 1993, que publie en 1994 l’Encyclopedia Universalis, écrit, sous la signature de Michel P. Schmitt : « désenchanté, lassé peut-être à certains moments d’être statufié dans le personnage de l’« anar » qu’on apprécie tant que son anticonformisme ne met pas la propriété en danger, Ferré se retire en Toscane avec Marie, sa nouvelle compagne et, reddition ou provocation supérieure (« I am un immense provocateur »), fait des enfants. (…) Ce « vieux mec de trois jours et de dix mille ans » (L’amour meurt) se place de façon inédite au carrefour de la chanson de variétés, de l’anarchie de cœur, d’un romantisme intimiste et visionnaire à la fois et même d’une forme d’« écriture du désastre », quand la poésie est réduite au constat qu’Il n’y a plus rien ».
Voici donc un panorama, certes non exhaustif, des notices dévolues à Léo Ferré dans les dictionnaires et les encyclopédies (à l’exclusion de celles contenues dans les innombrables histoires de la chanson, ou dans plusieurs anthologies de poésie). Dans ces ouvrages, la neutralité de l’ordre alphabétique interdit de le mettre plus qu’un autre en avant. Bien entendu, je n’ai pu citer que des extraits de ces présentations, souvent longues. J’ai ignoré la quasi totalité des éléments biographiques, les listes de titres, pour m’attacher à ne relever que des fragments pouvant composer le portrait le moins inexact possible.
00:00 Publié dans Propos | Lien permanent | Commentaires (7)
Commentaires
"L'Universalis" a une particularité, c'est que les notices sont faites (même les plus courtes) par des spécialistes de la "matière".Ainsi, tous les articles sur les philosophes et sur les concepts de la philosophie ont été rédigés par des philosophes, et revus ou réécrits régulièrement.
savez-vous quelque chose des auteurs des notices?
L'approche sera sûrement différente avec un " spécialiste" de la discipline et un polygraphe qui fabrique des notices sur commande , comme Raoul Vaneigem, bon connaisseur des hérésies chrétiennes,mais qui a toujours gagné sa vie en rédigeant des articles de dictionnaires tout azimuth.....
Vous avez fait un gros travail, Jacques...et un peu ingrat...C'est le genre de choses que je n'arriverai pas à faire.
Les notices de "L'Universalis" me semblent, à première lecture ,les plus intéressantes, les mieux écrites,avec de belles formules,bien que "l'écriture du désastre" ait besoin effectivement de guillemets: C'est la reprise d'un titre de Maurice Blanchot
Écrit par : francis delval | jeudi, 06 décembre 2007
Je n'ai guère de mérite, c'est une simple compilation.
Je possède quelques uns de ces ouvrages, mais pas tous. Pour certains, j'ai, au fil des années, photocopié uniquement la page concernant Ferré, en bibliothèque. Ce qui explique que je n'ai pas sous la main les noms des auteurs. C'est un tort, d'ailleurs : de même que j'ai scrupuleusement relevé les références bibliographiques des ouvrages photocopiés, j'aurais dû noter les noms.
Pour ce qui est de "l'écriture du désastre", Michel P. Schmitt a fait confiance à l'érudition de ses lecteurs, en ne citant pas l'auteur, supposé connu. Il s'est contetné des guillemets.
Je ne suis pas certain que ce genre de note intéresse beaucoup de monde sur ce blog. Pourtant, il me semble qu'une notice d'encyclopédie est une forme de la réception qui est faite d'un artiste et de son oeuvre. Le Who's who nous donnait le point de vue -- même très distant -- de l'intéressé. Les dictionnaires et les encyclopédies offrent un autre regard.
Écrit par : Jacques Layani | jeudi, 06 décembre 2007
je ne pense pas qu'il y ait un manque d'intérêt pour ce genre d'informations,mais c'est le commentaire qui n'est pas simple...à part faire des relevés de vocabulaire,inventaires lexicaux...et à
faire la chasse aux clichés et idées reçues.Mais il y en a moins que je l'aurais cru.
Écrit par : francis delval | jeudi, 06 décembre 2007
C'est toute la question des blogs, leur principe même. En effet, d'une façon générale, l'intérêt d'une note ne se mesure évidemment pas au nombre de commentaires. Cependant, les commentaires sont le seul moyen qu'a l'auteur de la note de savoir si elle a été lue ou pas, si elle a intéressé ou pas. Que les lecteurs soient d'accord ou non, bien entendu. Autrement, il ne dispose que de statistiques imprécises, abstraites -- et encore, seulement quand le système fonctionne bien.
Écrit par : Jacques Layani | jeudi, 06 décembre 2007
L'auteur de la notice Universalis n'est personne d'autre que...
... Louis-Jean Calvet !
Yeah !
Enfin bref, on ferait mieux de retravailler la notice Wikipédia, vous croyez pas ?
Écrit par : The Owl | samedi, 08 décembre 2007
Calvet a certes fait un Ferré mal ficelé en 2003,mais il connait quand même bien la chanson et est tout à fait capable de faire une notice de l'Universalis.C'est plus facile que la grammaire des langues africaines, sa spécialité d'origine.
J'ai jeté un oeil il y a peu sur Wikipédia...La notice sur Ferré a été nettement améliorée.Il n'y plus les grosses erreurs d'il y a six mois.Trop de détails,oui,et souvent de peu d'importance.Mais on ne va pas se mettre à corriger Wikipédia.....Il y a tellement de mauvaises notices, inutilisables, que ce serait du temps perdu.The Owl, faites ce que vous voulez.Je vous ai déjà dit que Wikipédia ne m'intéresse pas.Pas du tout...
Écrit par : francis delval | samedi, 08 décembre 2007
Je n'ai rien contre Wikipédia, j'y ai quelquefois recours, mais, là encore, je ne peux pas tout faire. Si d'autres veulent s'en charger... J'avais lancé l'autre jour un appel pour la consultation de ce qui reste des archives de l'Ecole libre des sciences politiques, mais personne n'y a répondu. Il y a ça aussi, à faire.
J'avais aussi apporté, il y a peu, une précision à la suite de la note Gaby de l'Arlequin, qui avait pourtant fait naître une discussion qui paraissait intéresser des participants. Mais cette précision semble être passée inaperçue.
Écrit par : Jacques Layani | samedi, 08 décembre 2007
Les commentaires sont fermés.