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lundi, 21 janvier 2008

Trois jeunes timides

Marseille, février 1971. Les trois amis déjà évoqués ici se dirigent vers le théâtre Axel-Toursky où Léo Ferré va chanter pour la première fois. C’est l’après-midi, ils vont, au hasard, voir s’il se passe quelque chose.

Le Toursky est alors une école désaffectée. Richard Martin a récupéré les anciens fauteuils, réformés, de l’Opéra de Marseille : des sièges de bois. Il a vingt-huit ans, les cheveux aux épaules et de l’enthousiasme. Il a commencé l’année précédente à faire vivre ce nouveau lieu de spectacle. C’est Ferré qui, cinq soirs de suite (dont quatre sans cachet), va lancer véritablement la salle et faire découvrir aux Marseillais le chemin du 22, rue Édouard-Vaillant (téléphone 50 75 91), où s’ouvre un passage qui sera, longtemps plus tard, baptisé Passage Léo Ferré. Pour le moment, des cartons d’œufs tapissent les murs et servent à l’insonorisation. Dans sa loge, la gardienne vend les billets. Un jour, l’éclairagiste, Michel Tzicuris, voulant réparer ou régler un projecteur, tombera du haut des cintres sur les fauteuils et se tuera. Longtemps, son portrait demeurera dans la salle.

Sur la droite, les issues dites de secours sont des portes donnant directement dans le passage en question, sans le moindre couloir. Elles sont ouvertes. L’un des trois, timidement, entrouvre le battant et passe le bout du nez dans la salle : « Il est là ».

Ils se concertent, hésitent, sont littéralement mangés par la timidité mais ils décident d’entrer et se tiennent debout, près de la porte, tentant de se confondre avec le mur. Oui, « il » est là et la candeur des dix-neuf ans (même pas, dix-huit et des poussières) des trois camarades n’en revient pas. Un type à moustaches, cheveux longs, portant beau, règle les lumières : « Envoie-moi un peu de rouge », « Tu m’envoies du bleu, par là ». C’est Frot. Puis Léo Ferré, sans lâcher sa cigarette allumée, vient, les bras croisés, faire « la balance ». Il chante uniquement quelques vers des Poètes, puis, à quelqu’un de la régie : « Ça va, comme ça ? »

Ils s’enhardissent encore, nos trois gamins. Ils vont s’asseoir dans une rangée de fauteuils, au milieu, bien dans l’axe de la scène. Oh, du bout des fesses, et encore. Ferré reçoit un journaliste à qui il déclare, lors de la conversation : « J’ai de jeunes amis dans la salle. Il est quatre heures de l’après-midi, ils sont venus me voir… » Tiens, ils ne sont donc pas passés inaperçus, les trois qui se pensaient discrets.

Quelqu’un, ensuite, arrive du fond de la salle : « Léo, téléphone ! » Soit. L’artiste, docile, descend de scène et se dirige vers le récepteur. Il passe dans la rangée située juste derrière les trois jeunes qui, spontanément, se lèvent. L’artiste, très gentiment : « Ne vous dérangez pas ». Ils n’avaient pas à se lever puisqu’il passait derrière eux, mais ce fut instinctif.

Dans l’entrée – un minuscule bout de couloir où, avant le spectacle, le public s’entasse – une affiche est dédicacée : « À Richard Martin, le Dullin de la Belle-de-Mai. Fraternellement, Léo Ferré ».

Un souvenir encore émerge de ce moment. Sur la scène, Ferré est debout devant le piano. Il joue quelques mesures puis, définitif : « Il est faux ». Il est encore tôt et l’accordeur, sans doute, était-il en chemin.

Très impressionnés par cette après-midi, les trois garçons remettront ça l’année suivante, quand Ferré sera annoncé les 9 et 10 mars 1972 au Palais des Congrès, mais cela a déjà fait l’objet de la note Trois amis et les pops.

00:00 Publié dans Souvenirs | Lien permanent | Commentaires (14)

Commentaires

Deux jeunes intimidés
Novembre 1971. Deux jeunes, coincés à Bâle, suite au vol de leur argent durement gagné à faire les vendanges en Allemagne, sur la Moselle,à Cochem précisément.
Être sans argent en Suisse ce n’est pas facile. En attendant des jours meilleurs, ils sont hébergés et nourris à l’auberge de jeunesse contre quelques heures de ménage. Pendant cette halte forcée, sur le chemin de la bibliothèque (gratuite et chauffée) une annonce : Un spectacle de Ferré au Théâtre Fauteuil, à Bâle. Ça ne se refuse pas ! mais nous sommes strictement fauchés, pas moyen de réserver ni d’acheter les billets.
En désespoir de cause, nous nous décidons d’attendre Léo pour lui demander deux entrées gratuites. Nous arrivons très tôt devant le théâtre. Il est un peu plus de 18h. Une heure plus tard environ, dans la cour pavée, trois silhouettes : Léo et derrière, nous le devinons, Maurice Frot qui guide Popaul. Quand Léo passe devant nous, nous prenons tout notre courage pour le héler : ‘Léo, on pourrait avoir des places ,’ Léo s’arrête, Maurice s’interpose pour nous dire que nous pourrons le voir plus tard, ailleurs, en France. Ah non, pas en France répond l’un de nous. Léo intervient : ‘Vous avez fait des conneries ?’
_ Bah, mon pote est déserteur, moi je suis insoumis alors…
Léo et Maurice s’échangent un regard ‘Alors, les gars, pas de problème. Attendez-nous-là, nous allons vous reprendre à notre retour’.
Dire que nous étions heureux est un peu faible.
C’est une histoire assez banale, Ferré a toujours été d’une grande générosité. Ce qui l’est moins c’est la suite.
A leur retour, Maurice Frot s’approche de nous et nous demande de le suivre tandis que Popaul et Léo rentrent dans les coulisses : Et Frot nous dit :’Léo s’excuse, tout à l’heure, il n’a pas pensé à vous inviter à manger’.
Tu parles ! On n’avait pas faim. Mais nous sommes sidérés par cette attention. On rassure Frot, nous sommes ravis de voir Léo. Ça suffit à notre bonheur. Et bien non, le bonheur continue : ‘Voilà Léo a des amis en Toscane, c’est bientôt la récolte des olives, ça vous intéresse ?’ nous demande Fot
Tu m’étonnes, pouvoir quitter la Suisse et partir pour l’Italie. Nous acceptons avec enthousiasme, et Frot nous donne une adresse. Nous nous perdons en remerciements.
A la fin du spectacle nous sortons avant la fin des applaudissements espérant pouvoir remercier Léo de vive voix, mais trop tard, on le voit s’éloigner
Et c’est ainsi que les deux jeunes intimidés sont arrivés à Castellina-in-Chianti où ils découvriront que Léo leur avait donné son adresse. Nous y rencontrons Marie-Christine, et ses sœurs Danièle et Patou, Vincente De Benedetti et Lucien, deux amis marseillais, nous croiserons Grooteclaes. Mais c’est une autre histoire.
Daniel DALLA GUARDA

Écrit par : Daniel Dalla Guarda | lundi, 21 janvier 2008

Anecdote sympa: mais vous aviez menti? (Bah, mon pote est déserteur, moi je suis insoumis alors…).

Écrit par : gluglups | lundi, 21 janvier 2008

je ne mens pas , et je signe de mon nom.
Tout le contraire d'un gluglups qui allie à la lâcheté l'ignominie.
Longtemps responsable d'une association de parents d'élèves dans le 14ème à Paris j'ai rencontré un connard de "prof"qui depuis s'en prend à tous ceux qui sont plus importants que lui : 'professeurs de lycée, professeurs universitaires"
Faut-il que je précise le nom ?
je ne parle pas du forum où le même gluglups me pissait à la raie (c'était ses termes) parce que je refusais d'y participer à cause de lui.

C'est bien de gluglups de suspecter les autres.
Regardez-vous dans une glace, faites un exament de conscience ou votre 'coming out', et foutez-nous la paix. A moi en tout cas
Pauvre type
je signe et je ne mens pas
Daniel DALLA GUARDA
18 boulevard Jourdan paris 14

Écrit par : Daniel Dalla Guarda | lundi, 21 janvier 2008

Commentaires en forme de questions:
Vous qui signez de votre nom (ce devrait être un pléonasme) et dont les contributions à ce blogs sont si intéressantes comment pouvez-vous supportez ce donneur de leçons qui n'est qu'un envieux aigri par sa propre médiocrité ?
question annexe : avez-vous cru que je mentais ? Que je vivais à Bâle en voyage de noces , ou quoi d'autre
Tout ça pour dire que je trouve les commentaires et les notes de F. Derval , de J. Miguel de S. Oron très intéressantes; (Je cite de mémoire que les autres ne m'en veuille pas de ne pas les citer)
Bien cordialement
Daniel DALLA GUARDA

Écrit par : Daniel Dalla Guarda | lundi, 21 janvier 2008

Daniel, pourquoi t'énerves-tu ainsi ? Je pense vraiment que Gluglups voulait seulement en savoir davantage sur ton statut d'alors. C'est une question qu'il a posée : il y a un point d'interrogation.

De plus, il a trouvé ton histoire sympathique. Ne prends pas la mouche comme ça, je t'en prie.

Quant à la question de l'anonymat, elle est vieille comme internet. Même moi, je m'y suis fait. Allez, personne n'a cru que tu mentais, bien sûr.

Raconte-nous plutôt pourquoi tu étais insoumis : ce sera dans la ligne de cette discussion et cela, de plus, intéressera tout le monde.

Il ne faut pas te fâcher comme ça, crois-moi.

Écrit par : Jacques Layani | lundi, 21 janvier 2008

Désolé Jacques de te peiner mais je ne suis ni énervé (même si ça m'arrive) ni fâché.
Simplement des types comme Gluglups ça me dégueule (du verbe dégueuler).
Pourquoi être insoumis : c'est plus rapide que déserter et ça m'a évité de rencontrer des connards !

je suis sincèrement désolé vis-à-vis de toi car je voulais te raconter ce souvenir (pour moi ce n'est pas une anecdote) pour te faire plaisir pour une fois que j'ai un peu de temps

Écrit par : Daniel Dalla Guarda | lundi, 21 janvier 2008

Bonsoir,
Je n'interviens guère sur ce blog,n'ayant pas les connaissances ,concernant Léo Ferré ,que peuvent avoir les intervenants habituels.Nonobstant cela,c'est avec un grand plaisir que je lis les différentes notes,toujours pertinentes,bien documentées.Bon,Glup est peut être"un immense provocateur"mais à l'époque où je lisais le forum du site "officiel",c'est souvent lui qui faisait avancer le débat qui permettait ,au dit forum ,d'être un lieu de débat,ce qu'il n'est plus d'après moi.
Ainsi,à mon avis,ne transformons pas le blog de Jacques Layani en forum bis.Je pense qu'un lieu de médiocrité,le forum Léo Ferré.com ,suffit à notre malheur!
Amitiés à tous et à Glup!
Frédéric Morino/Blackman.

Écrit par : Frédéric morino | lundi, 21 janvier 2008

Merci Daniel, merci Frédéric.

Je suggère que chacun oublie ces colères d'un moment et que nous poursuivions notre travail commun de recherche et de tentative de compréhension de l'oeuvre de Léo Ferré.

Ce lieu était parvenu à tenir quatorze mois sans incident, sans accrochage. C'était une première sur internet, s'agissant de Léo Ferré, qui a toujours suscité les passions.

Je continuerai à faire de mon mieux pour que les textes soient intéressants si possible et, en tout cas, rédigés dans une langue accessible à tous. Je continuerai également à tenter de faire régner l'amitié dans les discussions. Les commentaires restent toujours libres et ouverts. J'en appelle à la bonne volonté de chacun.

Écrit par : Jacques Layani | lundi, 21 janvier 2008

hello,
je sens déjà des relents chez certains à la vue de mon pseudo
mais pas de souci,
je ne suis pas ici en querelleur!!!
qu'on continu à se masturber intelectulellement et tranquillement sans orgasme
j'avoue avoir appris quand même de nombreuse choses
que l'esprit demeure....
grose bise à glups et willy

Écrit par : antyprine | mardi, 22 janvier 2008

On continuera, Antyprine, on continuera... Mais tout ça me fatigue, aujourd'hui comme en 2003. A ceci près que j'ai cinq ans de plus et des problèmes de santé. Mais enfin, on continuera.

Écrit par : Jacques Layani | mardi, 22 janvier 2008

hello gg, anty, willy et meli et ... les autres

Écrit par : ilargi | jeudi, 24 janvier 2008

Non, Jacques, je ne m'intéresse nullement au "statut" de la personne plus haut, qui m'indiffère totalement. Simplement, son texte est rédigé de telle manière, qu'on comprenait que dire, comme on s'y attendait, "nous sommes trop pauvres et fauchés" n'aurait pas suffi pour obtenir une entrée gratuite à un concert de Ferré. Sans doute ce monsieur croit-il que la célébrité de son nom permettait de savoir ce que son texte n'exprimait pas. C'est étonnant: on commence insoumis et on finit ancien combattant. Avec les souvenirs qu'on raccomode.

Il existe un "sketch" dégoulinant de vérité de Patrick Sébastien/ J.L. Foulquier, que vous connaissez peut-être Jacques:
http://www.youtube.com/watch?v=rE8vk4vrEp4

"Je suis horrifié. j'ai envie de crever en voyant ca", commente un PSEUDO. Mais tous les PSEUDOS du monde ressentent la même chose devant ce spectacle. Est-il possible de parler de Ferré autrement?

Je n'ai aucun doute concernant la probité et l'intégrité de ce monsieur. J'aimerais effectivement pouvoir me regarder sans trop de difficultés dans la glace mais je n'y parviens pas: je me trouve trop moche! Que je l'envie lui, qui tous les matins peut contempler et admirer l'image, signée, de sa bonté et de son courage, avant d'en faire bénéficier ensuite tous les autres autour de lui. Et de mener ses investigations policières, en exerçant ses "responsabilités".

Oui, je reconnais que je suis parfaitement médiocre. C'est effectivement médiocre que de lire régulièrement un blog et surtout d'y répondre. C'est tellement plus médiocre que de recopier à la lettre des étiquettes de vieux disques achetés sur ebay. C'est tellement médiocre que de n'avoir jamais été invité chez sa star et de n'en pouvoir tirer aucune légitimité morale.
___________

Chers antyprine, Frédéric, ilargi, willy, tim et tous mes amis, et tous les pseudos du monde,

Vous comprenez que je ne puisse m'exprimer davantage: un contrat pèse sur moi. En Ferrétie. Dans le 14e arrondissement de Paris, où je ne peux plus mettre les pieds: une horde de responsables de parents d'élèves (au secours!) de ce quartier m'y attend pour me lyncher.

J'avais migré ici, accueilli par Jacques Layani. Pourtant je l'avais prévenu que cela ne plairait pas à ses amis... ni aux miens peut-être.

Alors peut-être à bientôt, ailleurs...

your gg

Jacques peut aussi communiquer mon adresse email à Francis: si celui-ci accepte de m'envoyer ses textes de temps à autre, cela me ferait plaisir.

Écrit par : gluglups | jeudi, 24 janvier 2008

hum,
c'est dommage!!!
je trouve rien à redire sur ce qui est raconter ici.
le propos est souvent intéressant,primesautier.On ressent un véritable effort d'intelligibilité
certes défois cela dérive en "maniaquerie" : cf le problème insoluble des accents et autres fautes d'orthographe
mais le verbe est clair et on sent qu'on avance dans la compréhension de l'artiste
le seul défaut est qu'il est impossible de critiquer
je ne parle pas de tel ou tel auditeur mais de léo
on doit considerer l'homme comme
une oeuvre et vis versa
les critiques ne se résumant point,bien sûr, à dire j'aime ou j'aime pas...
mais quid de cela!!!!
glups est un intervenant que j'apprécie,car il a une culture et un sens critique très développé,souvent pris à tort pour de la provocation
il est un moteur important dans la compréhension de ferre.Les réponses faites à ces questions sont tout aussi passionnantes,et apprennent tout autant.
quant à la question de l'anonymat,je ne vois pas en quoi certains y voit une preuve de veuleté
c'est une volonté de reduir ses arguments sans en tenir compte.On ne répond pas, on puise dans son anonymat,facile
et dites moi stendhal,voltaire c'était pas des pseudos...
je vous souhaite layani un prompt rétablissement
ferre ne sera pas un sujet facile tant qu'on admettra pas qu il peut être autre chose qu'un objet de nos fantasmes

ps salut ilargi

Écrit par : antyprine | vendredi, 25 janvier 2008

Merci pour vos souhaits, Antyprine. J'ai répondu à Gluglups en privé, hier soir.

Écrit par : Jacques Layani | vendredi, 25 janvier 2008

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