mercredi, 11 avril 2007
Des « périodes »
Je supporte mal qu’un être soit découpé en rondelles, en tranches, soit compartimenté, borné à gauche et à droite, arrêté. La plupart du temps, on le sait, ces découpages sont faux. En tout cas, ils sont insupportables. Un homme est un, indivisible, et son œuvre, s’il en a une, l’est comme lui. Déterminer des périodes, c’est donner aux circonstances, aux rencontres, une importance qu’elles n’ont pas. Il n’est évidemment pas question – ce serait absurde – de nier le rôle joué par tel ou tel, de négliger l’importance de telle personne, de réduire l’influence de tel moment. Il reste que l’homme, et l’artiste s’il est artiste, est unique, entier dans le déroulement de sa vie qui ne tient ni dans un catalogue de firme phonographique ni sur un registre d’état-civil, ni dans un lit conjugal, ni dans une école de pensée, ni dans une maison…
Léo Ferré n’a pas connu de périodes, tout cela est faux. Je pense que je ne convaincrai pas car l’idée est si ancrée que je n’ébranlerai pas l’édifice. Tant pis.
Il n’y a pas de « période Chant du Monde », de « période Odéon », de « période Barclay », de « période toscane » (soit les « période CBS », « période RCA », « période EPM » « période La Mémoire et la mer »). Il n’y a pas de « période Odette », de « période Madeleine », de « période Marie ». Il y a un homme et son œuvre, en tout et pour tout. Ce qu’on étiquette « périodes » est toujours la conséquence de questions autres qu’artistiques.
Dans le cas de Léo Ferré – on ne reviendra pas ici sur la question du pain retrouvé abordée plusieurs fois dans ces pages – on sait que la parution, en disque ou en volume, de telle œuvre à tel moment, est exclusivement le fait de circonstances matérielles précises et d’opportunités. On sait que l’œuvre en question, la plupart du temps, fut écrite ou composée antérieurement, voire bien longtemps auparavant. Et parfois, on s’en apercevra lorsqu’on disposera de la totalité du corpus, encore plus longtemps auparavant, quelquefois des années avant ce qu’on imaginait jusque là. Autant dire que, dès ses débuts et sans doute dès sa jeunesse, voire dès son enfance, sans qu’il soit évidemment question de prédestination, Ferré était dans Ferré. Il n’aurait alors fait qu’une chose : passer sa vie à s’accomplir, c’est-à-dire à éclore. Il faut une vie pour faire sa vie.
On n’en finirait pas de donner des exemples battant en brèche l’idée admise. On devra donc se cantonner à quelques uns. Cette fameuse « période Barclay », par exemple, est inexistante. C’est un fantasme, un mythe, une chimère. Ainsi, le disque d’Aragon (1961) était prêt en 1959, soit avant l’entrée de Ferré chez Barclay. Belleret évoque même un projet au Chant du Monde avec une pochette d’Hervé Morvan (je rappelle à ce sujet que ni sa fille Véronique ni son assistant Léo Kouper n’en ont jamais entendu parler et qu’il n’existe aucun travail préparatoire). Les mises en musique de poèmes extraits de Poète… vos papiers ! seront constantes et étalées sur les catalogues de plusieurs maisons. Le disque de 1969, le célèbre 33-tours à pochette blanche, était prêt à paraître longtemps avant, sa sortie ayant été retardée par des inquiétudes que la chanson Les Anarchistes causait à l’éditeur. D’ailleurs, cette chanson était écrite et composée dès 1967 (ou 1965, selon les sources). Elle fut retardée, avant même la maison Barclay, par Madeleine Ferré qui pensait, avec ses raisons, que son mari ne devait pas l’enregistrer. On sait que le départ de Ferré de chez Barclay eut lieu après la parution du disque de 1974 et qu’une clause de son contrat lui interdisait d’enregistrer ailleurs avant le 1er novembre 1976. Mais ce fut un épiphénomène. Dans une lettre qui a été publiée – ce n’est pas moi qui l’affirme – Ferré dit à Barclay (je parle ici de Barclay lui-même, non de sa maison) qu’il aurait sans doute signé un nouveau contrat avec lui s’il avait eu l’idée d’effectuer une prise du spectacle du Palais des Congrès, en novembre 1975. Barclay ne l’ayant pas cru utile, ou n’y ayant tout simplement pas pensé, Léo Ferré n’est pas partant pour un nouveau contrat. S’il avait existé un enregistrement public du Palais des Congrès, Ferré aurait continué chez Barclay avec sa nouvelle manière : un orchestre symphonique dirigé par lui, jouant sa musique orchestrée par lui. La maison aurait-elle été d’accord, c’est une autre affaire, un autre débat. Il reste que la supposée « période symphonique » serait alors contenue dans la supposée « période Barclay » et non opposée à elle, non à cause d’orientations artistiques différentes, mais tout simplement par des contingences matérielles. Ce qui importe, c’est de bien comprendre que la supposée « période Barclay » est elle-même constituée de plusieurs chemins qui sont tout autant constitutifs de Ferré lui-même. Entre autres, les grands microsillons consacrés aux poètes. C’est dans ce catalogue qu’on en trouve le plus. Cependant, on sait que des musiques pour Verlaine furent composées en 1959, soit avant l’inscription de Ferré au fronton du temple Barclay. Ces ensembles sont une part intégrante de son travail et il faut être têtu pour persister à ne pas les inclure dans la pseudo-intégrale (la seconde, pourtant) publiée en 2003 par cette maison, accompagnée d’un livret à l’improbable titre Les Années de feu. Comme s’il n’y avait plus eu, ensuite, que des cendres ! [1] Enfin, de quel feu s’agit-il ? Où est le rapport entre le 25-cm de 1960 et le 30-cm de 1974 ? Entre Quand c’est fini, ça recommence et Les Amants tristes ? Où est donc la « période Barclay » ?
La soi-disant différence d’écriture « après 1968 » est, au moins en partie, un leurre : beaucoup de textes étaient composés avant et ne sont sortis ensuite qu’à cause, là encore, de contingences. On le sait partiellement, on le constatera plus tard, quand auront été publiés de nouveaux éléments. L’essentiel, ici, est que ce ne fut pas un choix artistique que de rendre publiques telles créations après 1968, mais uniquement le résultat de circonstances affectives et sociales. Or, on ne peut lier un homme à l’histoire de son temps exclusivement, ni simplement à ses histoires d’amour. Bien sûr, toutes concourent à le constituer – mais pas seulement. Il reste la part de l’individu, cette chose qui fait qu’il est lui et personne d’autre, et c’est de cette part que naît le processus de création artistique. Il se nourrit certes, ensuite, des deux histoires en question, pousse sur leur terreau, mais il naît là.
Poète… vos papiers !, initialement publié en 1956 à la Table Ronde, est constitué de poésies écrites dès 1953 et même avant, au moins pour certaines. Avant de paraître chez cet éditeur, il fut refusé par Laffont et par Denoël. Cet exemple permet de comprendre qu’il est absurde de lier, par exemple, Poète… vos papiers ! à la « période Odéon » puisque, s’il avait paru en 1953, il eût été possible de le rattacher à la « période Chant du Monde ». Ce ne fut qu’affaire de circonstances et de délais. S’il avait existé d’authentiques périodes dans la vie et l’œuvre de Léo Ferré, il n’aurait pas mis en musique, sa vie durant, des textes de ce recueil, ce livre fondateur, finalement. Il y a fort à parier que, s’il avait vécu, Ferré serait, un jour ou l’autre, parvenu à mettre en musique la totalité du livre, excluant de fait, on le remarque, la notion d’« après 1968 ».
Autre exemple, celui des pages finales du roman Benoît Misère, achevé en 1970 dans les circonstances déjà narrées dans ce carnet : le passage dans lequel Misère s’adresse aux morts où, longtemps, l’on a cru discerner l’écriture d’« après 1968 » est, on le sait aujourd’hui, extrait de Lettre à une tombe, fragment du recueil inachevé Lettres non postées, soit une prose des dernières années 50, au plus tard des toutes-premières années 60.
Les exemples ne manquent pas ; une énumération lasserait. Mon idée est qu’il n’y a qu’un seul Léo Ferré avec une seule œuvre, celle-ci ayant été délivrée (et l’on pourrait gloser sur ce terme ! [2]) au fil des ans, à la faveur de circonstances particulières lui appartenant ou non, c’est-à-dire sur lesquelles il eut prise ou pas. Lui ne cessa jamais d’être lui-même et d’écrire ce qu’il désirait écrire, le présentant au public soit dans la suite immédiate de l’écriture, soit quelque temps après, soit longtemps plus tard. Le temps, d’ailleurs, n’eut jamais grande importance pour lui. Il disait fréquemment : « Il y a quelques années » ou « Il y a deux ans » pour signifier un moment vieux parfois d’une ou deux décennies. Combien de fois a-t-il parlé de « ce temps relatif », propos qu’il faut rapprocher de phrases comme « moi vieillissant au fil de toi maintenant que je pense à toi » ou de « il n’est de vivace que le temps de ma folie ». N’extrapolons pas.
Un seul constat s’impose. Tout texte, publié ou non, en vers classiques ou libres, ou bien en prose, est susceptible d’être un jour mis en musique. De tout long texte peuvent à tout moment naître plusieurs chansons. Toute poésie peut être regroupée avec d’autres. Toute œuvre déjà enregistrée peut être refaite. Toute musique peut ressortir, au moins partiellement, dans un ensemble plus vaste. Tout texte interprété en scène peut un jour être enregistré, parfois très longtemps après, ou bien rester inédit en version de studio. Tout titre prévu mais non employé peut devenir celui d’un autre projet. Rien n’est jamais figé dans la création ferréenne et les années passant n’y font strictement rien. De là, la fausseté des « périodes » découle d’évidence. Léo Ferré a toujours considéré son travail comme lui appartenant entièrement puisqu’issu de lui, de sa tête, son dernier bastion de solitude, son ultime tour de guet. De là, certainement, cette position de démiurge. Créant son monde, il l’anime ainsi qu’il le souhaite, en rature le dialogue, en bouscule les personnages. Cet aspect des choses nous amène à un autre propos : imaginer Ferré romancier, exclusivement romancier, ce serait penser un créateur de livres foisonnants, aux personnages récurrents, soumettant ses créatures imaginaires à des vouloirs profonds et soudains. C’est-à-dire que ce ne serait pas exactement Benoît Misère. Là encore, n’extrapolons pas.
En revanche, s’il faut discerner une frontière indéniable, ce sera celle d’une évolution de sa prose vers 1980, à peu près. C’est un autre problème, pas du tout lié à quelque idée de période que ce soit, et sur lequel je n’en finis pas de m’interroger. Il faudra bien y venir et consacrer à ce sujet le développement qu’il mérite et que je repousse depuis des mois. Je ne suis pas certain, en toute honnêteté, d’avoir vraiment compris ou seulement cerné ce changement stylistique qui, à mon avis, n’a rien à voir avec « le style de l’invective » qu’il disait chercher depuis – au moins – 1962. Ce sera le sujet d’une autre note.
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[1]. Je signale par ailleurs que le titre Les Années de feu existait déjà, appliqué à une anthologie de disques de quarante-neuf vedettes (dont Ferré lui-même) publiée par Sélection du Reader’s Digest.
[2]. Distribuée, sortie des livres, libérée, défaite de son uniforme ? Ce mot paraît, en l’espèce, bien convenir.
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Commentaires
Non seulement je partage votre point de vue sur la stupidité du saucissonnage d'une vie, mais lorsqu'il s'agit de Léo FERRE, je me demande parfois si la mauvaise foi et la médisance ne sont pas alors en cause.
J'ai d'ailleurs dans une note précédente évoqué cela sous une autre forme (cf IMPRIMATUR II).
Vous avez raison, me semble-t-il, d'insister sur ce point.
Toute vie n'est qu'un continuum, formée d'une succession de fondus enchaînés mais en aucune manière d'une succession de rondelles, de compartiments ou de strates. La meilleure preuve chez Léo, l'évolution d'un texte, ou plutôt le passage du texte "Guesclin, les chants de la fureur" à "La mémoire et la mer".
"A bientôt, Dédé, à bientôt
Ici quelquefois tu nous manques"
Fraternellement à vous
Écrit par : lmv | mercredi, 11 avril 2007
Eh bien, nous sommes au moins deux à plaider en faveur du continuum. Je ne sais pas d'où vient cette manie de couper en morceaux les oeuvres comme les existences. Elle ne s'applique pas qu'à Léo Ferré. On dirait que l'exégèse a peur d'un ensemble et qu'elle préfère s'intéresser à des morceaux. Je ne comprends pas très bien.
Cette habitude est ancrée dans notre quotidien. Combien de fois entend-on l'expression "refaire sa vie", qui n'a pas de sens ? On avait dit à Montand qu'il refaisait sa vie quand il prit une compagne, après la mort de Simone Signoret. Il avait répondu : "On ne refait pas sa vie, on la continue", et c'était vrai.
Pour Roger Vailland, par exemple, on a parlé de "saisons" (François Bott, reprenant d'ailleurs un mot de Vailland lui-même) et longtemps, on a glosé sur ses saisons successives. La critique aujourd'hui revient là-dessus avec vigueur, s'étant aperçue que les compartiments ne menaient à rien et que les interférences étaient indéniables.
Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 11 avril 2007
Faites excuses Jacques, mais il me semblait avoir ouvert quelques unes des portes que vous vous obstinez ici à enfoncer avec l’angélisme dont vous êtes coutumier.
Avez-vous lu ma discographie commentée ?
Je veux dire l’avez-vous VRAIMENT lue ; pour y réfléchir, la valider ou la réfuter ?
Il me semblait y avoir précisément abordé les questions du statut de l’artiste dans les changements de son temps, de la segmentation esthétique en périodes, de la disjonction temporelle entre création et publication, laquelle pose problème dans les années 80 justement.
Comment voulez-vous que la pensée autour de Ferré avance si l’on ne prend pas en compte les travaux qui viennent successivement apporter de la matière à la réflexion commune ?
Votre présente note est hélas le signe d'un certain "autisme".
Ah là là ! Controverse, toujours et encore mes bons amis !
Pour ceux qui veulent des pistes :
http://www.artelio.org/art.php3?id_article=1084
Écrit par : The Owl | mercredi, 11 avril 2007
Je vous répète une fois encore que je ne prends pas en compte uniquement les disques mais l'ensemble d'une oeuvre.
Je savais que je ne pourrais pas convaincre, je l'ai dit en commençant. Tant pis. Je ne fais pas de prosélytisme. Nous verrons bien.
Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 11 avril 2007
On peut certes découper par "périodes" les enregistrements de Ferré,en fonction par exemple, des accompagnements ou orchestrations (période Defaye,période Popaul...),mais cela n'a strictement aucun intérêt,ça peut juste servir à classer nos vinyls ou cd;l'oeuvre de Ferré est un flux,un long cours avec des mutations musicales aussi bien qu'au niveau de l'écriture,il ya toujours eu chez lui des écritures simultanées,des compositions musicales diverses simultanées,avec certaines années des dominantes,mais découper en tranche Ferré ,c'est vraiment être étranger à son oeuvre,ne pas comprendre ce devant quoi nous sommes:une SOMME,à jamais indivisible.
Et je pense comme Jacques, qu'ilen est de même de Vailland:du "grand jeu" aux derniers romans, en passant par "la visirova"(roman-feuilleton):tout découpage est arbitraire
la spécialisation des travaux universitaires en littérature est en grande partie responsable du saucissonage des oeuvres
Écrit par : francis Delval | mercredi, 11 avril 2007
Je ne sais pas si votre message s'adresse à moi Francis, mais tout ce que je peux vous dire est que si vous aviez lu avec attention ma discographie, la notule sur De sacs et de cordes par exemple, vous sauriez que je ne pense pas autrement que vous.
Jacques, je ne dis pas que ce que vous dites est faux, bien au contraire !
La vie est un contiuum, oui. Et ensuite ?
Une fois qu'on a dit ça, nous voilà bien avancé !
Dans votre paradigme épistémologique vous faites flotter Ferré dans une sorte d'absolu qui nie cette vérité selon laquelle un artiste est inscrit dans un contexte et réagit face à ce contexte.
C'est bien joli de dire : "fi de la seule production discographique" ! mais c'est nier ce par quoi Ferré acquiert son statut d'artiste, ce par quoi l'oeuvre se concrétise et s'incarne pleinement, ce par quoi elle entre dans la sphère publique : la chanson.
Ferré ne ressort ni du champ littéraire, ni de celui de la musique savante. Il s'est sciemment inscrit dans celui de la musique populaire.
Dont acte.
Écrit par : The Owl | mercredi, 11 avril 2007
je n'ai jamais dit : "Fi de la production discographique", ce serait pour le moins stupide. Où avez-vous pris que j'ai dit ça ? Francis a très bien compris -- et mieux exprimé que moi -- la question de la simultanéité.
Ferré s'est inscrit dans la musique populaire, bien entendu. Et heureusement, sans quoi je serais le premier à ne pas l'avoir découvert, à l'époque, à être passé à côté.
Bien entendu, un artiste est inscrit dans un contexte. Les autres aussi, d'ailleurs. Vous vous trompez : je passe mon temps à tout expliquer, dans la vie, en fonction du contexte, justement. Je tiens que le contexte peut tout expliquer et permettre de comprendre : motivations, actes, pensées, réactions, jugements... Oui, eh bien ?
Je tiens cependant qu'il n'y a pas de périodes chez Léo Ferré, seulement un seul homme avec sa création sortant de lui. Cela n'empêche pas -- attention ! -- l'évolution. C'est pour cela que j'ai achevé ma note sur cette question découlant de ce qui précédait et qui mérite un long développement à elle seule. Je ne la "sens" pas encore cette note, j'y réfléchis, et il faut que je relise plusieurs textes en prose.
Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 11 avril 2007
j'ai regardé le site de the owl,qui me semble très bien,et les commentaires très sérieux et documentés:mais je ne vois pas où est le noeud du débat avec Jacques...
mais pour moi, Ferré fait partie du champ littéraire et musical aussi bien que de l'art populaire.je refuse de les dissocier
Écrit par : francis Delval | mercredi, 11 avril 2007
Moi non plus, je ne les dissocie pas ! Je ne découpe pas Léo Ferré.
Je crois que The Owl, dont j'ai évidemment lu la page discographique une bonne dizaine de fois, faut-il le préciser (et avant même de le connaître), tient à faire des nuances que je ne saisis pas toujours très bien. Mais c'est certainement un effet de mon vieillissement intellectuel.
Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 11 avril 2007
une vie n'est pas un long continuum tranquille,loin de là,celle de Ferré n'échappe pas à la règle,mais on ne peut faire coïncider les ruptures personnelles,amoureuses,familiales,les mutations et évolutions de l'écriture,les choix musicaux,les divers engagements de l'artiste,son positionnement dans telle ou telle conjoncture artistique,chaque "domaine" a sa propre scansion,sa périodisation,et il faut travailler au scalpel et non à la hache;et ni Jacques, ni the owl ne le font:pour moi,il n'y apas lieu de se crêper ce qui nous reste de cheveux:noue sommes d'accord sur l'essentiel,mais vous savez bien que c'est comme dans les colloques:on s'écharpe tjs sur un détail,une citation mal traduite,on un concept mal défini...
Écrit par : francis Delval | mercredi, 11 avril 2007
Mais bien sûr ! J'avais déjà esquissé les propos que je tiens ici dans la note du 25 février dernier, "Jalons pour une future biographie de Léo Ferré". C'est une de mes idées constantes.
Je n'ai pas le sentiment de me crêper les cheveux avec qui que ce soit. Heureusement. Je ne m'arrête pas à la véhémence que manifeste parfois The Owl, ça ne m'embête pas du tout : c'est ce qu'il dit qui m'intéresse et je ne vois sincèrement pas en quoi nous ne serions pas vraiment d'accord.
Écrit par : Jacques Layani | mercredi, 11 avril 2007
Je reviens à cette note. Patrick Dalmasso vient de me faire parvenir à son sujet le commentaire suivant :
"Je te livre donc deux ou trois réflexions que j'ai eues en te relisant (et en lisant les commentaires) :
1/ le concept erroné de "périodes artistiques" vient (essentiellement chez les journalistes) de la confusion entre style ou genre, et période (nous avons la presse que nous méritons !)
Par exemple, si Léo avait à un moment donné écrit des livres pour enfants, ça n'aurait pas été une nouvelle période, mais plutôt un nouveau genre abordé.
Il n'aurait pas pu écrire La "the nana" en 1956 mais il aurait pu (techniquement) écrire L'homme en 1985.
Il a une période "symphonique" au début et à la fin.
Il n'aurait pas pu, dans son premier disque aborder toute l'étendue de son Œuvre puisque le temps fait son œuvre aussi.
Je m'explique :
En 1950, par exemple, la pop music n'existait pas.
En 1950, par exemple, Odéon n'aurait pas confié un orchestre symphonique à Léo.
En 1950, par exemple, Léo n'avait pas expérimenté l'étendue de l'écriture (du vers classique au texte libre).
Il faut bien que le temps joue son rôle.
Sinon, il faut raisonner par l'absurde : si on tient au concept de périodes, il faut aller jusqu'au bout et chaque œuvre est une période ; ça nous fait donc des centaines de périodes chez Léo.
2/ le concept erroné de "périodes artistiques" est un outil marketing permettant de vendre le catalogue d'un éditeur phonographique qui, ne pouvant prétendre vendre "TOUT UNTEL", vend alors "TOUT UNTEL DU TEMPS QU'IL ÉTAIT CHEZ MOI".
Ce sont d'ailleurs des périodes nommées par des marques commerciales qui sont employées chez Léo.
3/ enfin, le concept erroné de "périodes artistiques" est la récupération du concept de périodes chez Picasso.
Quand une œuvre est immense (chronologiquement et quantitativement), on la découpe dans un souci "pédagogique", comme on aime découper les arts en écoles artistiques (faut que ça rentre dans des cases, c'est rassurant)".
Comme je faisais observer à Patrick : "juste une petite nuance à propos du vers libre. Je rappelle ce que tout le monde oublie ou feint d'oublier : le vers libre était déjà présent en 1950 (A la Villette) et en 1953 (Cloches de Notre-Dame)", il a modifié légèrement son commentaire ainsi qu'il suit : "effectivement l'exemple du vers libre est mal construit. Disons alors : en 1946, par exemple, Léo n'avait pas expérimenté l'étendue de son l'écriture (du vers classique au texte libre). C'est toujours l'idée que le temps joue son rôle dans une oeuvre".
Écrit par : Jacques Layani | samedi, 15 décembre 2007
encore une petite erreur
j'écris : "En 1950, par exemple, Odéon n'aurait pas confié un orchestre symphonique à Léo."
1950, c'est Le Chant du monde et non pas Odéon
Écrit par : Patrick Dalmasso | dimanche, 16 décembre 2007
Ce qui ne change rien au fond du problème, d'ailleurs.
Écrit par : Jacques Layani | dimanche, 16 décembre 2007
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